Nos pratiques alimentaires sont comme des itinéraires en constante évolution, tracées par notre prise de conscience grandissante des enjeux environnementaux. Cette transformation, souvent qualifiée de transition alimentaire, s’accompagne de régimes tels que le véganisme ou le végétarisme, reflétant ainsi la volonté de repenser la façon de nous nourrir.

Le terme “transition alimentaire” n’est ni nouveau ni inhérent à la période que nous vivons. Il a été utilisé dans les années 2000, s’appuyant sur le concept de “transition nutritionnelle” pour décrire les différents changements alimentaires des pays dits développés au XXe siècle. Selon le chercheur Barry Michael Popkin, cette transition peut être divisée en trois phases. La première se caractérise par une augmentation de la consommation de céréales, notamment de blé et de riz, grâce aux progrès agricoles. La deuxième phase voit apparaître une diversification alimentaire, accompagnée d’une augmentation de la consommation de sucre et de protéines animales. La troisième phase indique une inversion des tendances de la deuxième[1].

Très ancrée dans le patrimoine culinaire français, la viande a longtemps occupé une place centrale dans nos assiettes. En effet, en France, la consommation annuelle moyenne de viande par habitant a atteint 84,4 kg en 2020[2]. Et bien que l’on observe une certaine baisse de cette consommation, elle reste souvent le sujet principal de nos plats, reléguant les légumes, céréales et légumineuses au rang de garniture ou d’accompagnement.

Pourtant, l’impact environnemental de la production de viande est significatif. En premier lieu, les importations restent élevées, agissant donc sur l’empreinte carbone[3]. En deuxième lieu, selon la FAO, l’élevage, en particulier celui de la viande bovine, contribue de manière significative aux émissions de gaz à effet de serre. Leur rapport en 2016, estimait que 14,5% des gaz à effet de serre d’origine anthropique proviennent des filières de l’élevage[4]. En troisième lieu, l’élevage et la production de viande est particulièrement consommateur en eau. En effet, environ 30 % de l’eau utilisée dans le monde sert à la production de produits d’origine animale[5]. Enfin, elle est responsable de l’émission de certains polluants atmosphériques comme l’ammoniac, et de la pollution de l’eau. Au contraire, une alimentation moins carnée réduit les émissions de gaz à effet de serre et offre une empreinte environnementale plus légère. Il est estimé qu’une diminution de la consommation de protéines animales pourrait réduire les émissions de gaz à effet de serre, passant ainsi de 1,6 tonne à 1 tonne de CO2 par an et par habitant[6].

Les produits marins ne constituent pas forcément une meilleure alternative. En effet, près de la moitié provient de l’aquaculture, un mode d’élevage intensif du poisson. Ce mode de culture, non seulement néfaste pour pour le bien-être de l’animal, entraîne des conséquences désastreuses pour l’environnement et les communautés locales[7].

Le végétal a quant à lui un impact moindre sur notre environnement. Par exemple, les légumineuses émettent peu de gaz à effet de serre et contribuent de manière durable à la fertilisation des sols.

Néanmoins, cette durabilité dépend aussi des pratiques agricoles, notamment l’utilisation de pesticides et d’engrais, ainsi que de la saisonnalité des cultures. Les produits transformés et importés peuvent donc également avoir un impact environnemental néfaste, semant alors des embûches dans notre quête éco-responsable.

Il est alors temps d’initier un nouveau voyage : cap vers le végétal.

La cuisine végétale est définie par les ingrédients qui la composent et comprend donc une variété de légumes, fruits, racines, graines, champignons et fleurs[8]…laissant dès lors un choix presque infini d’ingrédients pour nos recettes.

Outre les avantages pour la planète, l’alimentation végétale est une aventure gustative passionnante. Elle promet de nouvelles saveurs, de nouvelles textures et associations ainsi qu’une richesse en vitamines et nutriments.

C’est ce que démontre le livre « La cuisine végétale de référence« , publié par les éditions BPI. Cet ouvrage, héritier de « La cuisine de référence« , un manuel incontesté depuis plus de 30 ans dans le domaine de la formation des chefs professionnels, marque une avancée significative vers une cuisine plus respectueuse de l’environnement. Selon Fabrice Prochasson, Meilleur ouvrier de France et Président de l’Académie culinaire de France, ce livre “offre un « référentiel universel » permettant d’explorer l’univers des légumes, des fruits, des légumineuses, des céréales, des graines, des herbes, des champignons, des épices, du café, du chocolat et de la vanille[9].

Cependant, la cuisine végétale n’implique pas forcément un aller sans retour.

La transition vers une alimentation végétale ne nécessite pas d’abandonner notre patrimoine culinaire. Au contraire, elle peut le valoriser tout en explorant de nouvelles alternatives lorsque cela est possible. Les équipes de United Kitchens, sensibles aux enjeux environnementaux et alimentaires, proposent une offre partiellement végétalisée, comprenant des options telles que le poke bowl au tempeh (protéine végétale de soja), des financiers aux saveurs variées mais entièrement végétaux, ou encore un gravlax de carottes. Cette approche démontre que les deux visions de l’alimentation, celle centrée sur le végétal et celle incluant des protéines animales, peuvent se compléter pour créer une expérience culinaire plus riche, plus respectueuse de l’environnement, et pleine de saveurs.

La cuisine végétale est comme un nouveau voyage, un voyage au centre de la terre. Promettant une expérience renouvelée de la nature, des goûts et des textures, elle nous invite à explorer un univers riche en découvertes et en enseignements, contribuant ainsi à façonner la cuisine de demain.

[1] École normale supérieure de Lyon. (s. d.). Transition alimentaire — géoconfluences. Géoconfluences ENS de Lyon. 2002. http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/transition-alimentaire [2] notre-environnement. Alimentation et environnement : les enjeux de la consommation de viande en France – Notre-Environnement, 2023. https://www.notre-environnement.gouv.fr/actualites/breves/article/alimentation-et-environnement-les-enjeux-de-la-consommation-de-viande-en-france [3] Ibid. [4] FAO. Élevage et changement climatique. fao.org. 2016. web_infographic-booklet-livestock-FR_2017 (fao.org) [5] Villiers, C. (2022, août 24). Combien d’eau consomme la production de viande ? Statista Daily Data. https://fr.statista.com/infographie/28080/consommation-en-eau-pour-la-production-des-aliments-viande-boeuf-porc-poulet-cereales-legumes/ [6] notre-environnement. Alimentation et environnement : les enjeux de la consommation de viande en France – Notre-Environnement, 2023. https://www.notre-environnement.gouv.fr/actualites/breves/article/alimentation-et-environnement-les-enjeux-de-la-consommation-de-viande-en-france [7] Les principaux enjeux de l’élevage de poissons. (s. d.). CIWF France. https://www.ciwf.fr/nos-mobilisations/poissons-les-grands-oublies/les-principaux-enjeux-de-lelevage-de-poissons/ [8] Frédéric Jaunault, La cuisine végétale de référence, editions BPI, 2023, p3. [9] Ibid, p5.